jeudi 27 décembre 2012

Le Poka-Yoke ou le Détrompeur ("mistake-proofing")


Dans son livre « Make no Mistake », Martin Hinckley partage ses méthodes pour réduire les ennemis de l’amélioration : la variation, la complexité et les erreurs. 
Pour l’auteur, la variation, les erreurs et la complexité excessive sont 3 sources distinctes de problèmes de qualité qui doivent être  « monitorées » séparément pour améliorer qualitativement la performance. 

L’objet de ce post sera de partager l’intérêt du Poka-Yoke  introduit pas Shigeo Shingo en 1960 et traduit en Français sous le terme de « détrompeur ».

 L’idée essentielle du Poka-Yoke  est de construire votre processus en vue de rendre toutes erreurs  impossibles par la prévention  ou au moins de rendre la détection possible.  Comme indiqué ci-dessus, les améliorations durables de la qualité ne peuvent être atteintes qu’à travers une attention constante aux contrôles de la variation, des erreurs et de la complexité.    Les erreurs sont pour lui et Hinckley  la source dominante des problèmes de qualité.  Comme toute erreur devrait être contrôlée pour atteindre un processus sans erreur, l’intérêt d’un système Poka-Yoke est de construire un processus fait d’actions qui nous protègent des erreurs.

Concrètement, Shigeo Shingo a reconnu trois types de Poka-Yoke pour détecter et prévenir les erreurs dans un système de production de masse ou de service :

  • La méthode de contact : elle  identifie les défauts des produits en testant la forme du produit, la taille, la couleur ou d'autres caractéristiques physiques.  L’existence de ce Poka-Yoke oblige le collaborateur  à ne pas faire d'erreur lors de l’action/la tâche.
  • La méthode du nombre constant  avertit automatiquement  le collaborateur si un certain nombre d’opérations n’est pas fait .
  • La méthode de la séquence  avertit si les étapes prescrites du processus n’ont pas été suivies. 
Soit le collaborateur est alerté quand une erreur est sur le point d'être faite, ou le dispositif Poka-Yoke empêche effectivement l'erreur d'être faite.

Pour Shingo,  5 catégories  sont à considérer dans  le « Poka-Yoke » : le collaborateur, le matériel, l’IT/la machine, la méthode et l’information.  Ces catégories d’erreurs ont été précisées par Hinckley : le matériel défectueux, l’information défectueuse, l’omission, le déréglage et la sélection d’erreurs.  Ayant identifié le type d’erreurs, vous pourrez chercher les solutions possibles pour l’éliminer durablement.

Shingo distingue par ailleurs  les erreurs et les défauts (erreurs qui touchent le client).  Pour Shingo,  les erreurs sont inévitables dans tout processus  mais par contre les erreurs doivent  être prises  en charge  pour empêcher  de produire  des défauts visibles par le client.  Shingo a d’ailleurs hiérarchisé les systèmes de contrôles qualitatifs en termes d’effectivité : l’inspection de jugement  ou le collaborateur contrôle, l’inspection informative ou le processus est contrôlé à travers un outil comme le SPC et l’inspection à la source qui ont pour but de vérifier les opérations à la source.

En éliminant les erreurs à la source, le coût des erreurs au sein d'une entreprise de service est réduite.   

Ce système de pensée permet donc  d’éliminer/de réduire les inspections qualitatives ou inspections en fin de processus qui ne sont là que pour contrôler des défauts de production.

Généralement pour mettre en place un tel système dans le secteur des services, nous devons passer par plusieurs étapes :

Première étape :  l’élimination de la demande sans valeur ajoutée et  l’élimination des erreurs en amont du processus par l’optimisation des sources d’information, l’amélioration des conditions de travail et des compétences, …

Deuxième étape : L’élimination des contrôles  algorithmiques.  Source d’erreurs, ces tâches algorithmiques sans valeur ajoutée pour le collaborateur sont à  éliminer (vérifier une date par rapport à une date, vérifier une somme, vérifier qu’un fichier a bien été uploadé,…).

Troisième étape : a) Rendre les sources d’erreurs visibles (mise en place de feu vert/rouge, …) et concentrer le contrôle sur les erreurs heuristiques qui sont soient dues au fait qu’elles ne respectent pas les étapes prescrites du processus, qu’un élément est manquant ou en erreur ou qu’un élément n’est pas conforme.  b) Remonter les contrôles au plus près d'où nait le risque.

Quatrième étape : Appliquer le PDCA soit réduire continuellement les effets d’une erreur  et/ou  soit en renforçant le contrôle sur ce type d’erreur (double check sur paramétrage, ….).  Pour ce faire la mise en œuvre d’une analyse systématique des causes d’erreur est nécessaire.

Selon  Hinckley : « la valeur la plus importante du Poka-Yoke est qu’indépendamment de la cause, du facteur psychologique, de l’étape de production, ou des conséquences potentielles, est qu’il bloque ou prévient d’un résultat non désiré à l’étape du processus ou les conséquences peuvent être minimisées ». 

Au-delà du Process Bahaviour Chart /Capability Chart (SPC)  qui mesure la stabilité du contrôle qualitatif, le schéma de pensée « Poka-Yoke » permet de  nous prémunir contre un éventail large d’erreurs communes ou spéciales (« l’erreur est humaine ») privilégiant l’identification de l’erreur au plus tôt qu’elle qu’en soit sa cause.  Ce système de pensée nécessite un changement profond de nos paradigmes de pensées sur le contrôle.

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